La CAN commence dans exactement trois jours, soit le 9 janvier 2022, au Cameroun, mais de véritables menaces troublent les esprits des amoureux du football. La fête du football va-t-elle se dérouler en toute quiétude au pays de Samuel Eto’o ?
Entre la menace des séparatistes dans les régions anglophones et celle des jihadistes dans le Nord du Cameroun, il faut dire que le pays traverse une période sécuritaire assez tendue. Alors que nous sommes déjà à la veille de la CAN, nombreux sont les observateurs qui se demandent si la compétition va se dérouler sans de mauvaises surprises. En plus de tout ceci, le Covid-19 représente aussi une véritable menace, surtout avec le variant Omicron. Suite à l’apparition de cette vague du variant, des rumeurs d’un report de la CAN avaient fuité, mais il n’en sera rien.
Au Cameroun, après les stades et autres détails importants en ce qui concerne l’organisation, le défi sécuritaire est l’autre qu’il faut relever dans un pays où une partie est livrée à une situation de guerre. En effet, cela remonte à 4 ans que dans le Sud-Ouest et le Nord-Ouest, des régions habitées par une minorité anglophone, des conflits sanglants se remarquent notamment entre des groupes armés réclamant l’indépendance.
À ceci s’ajoute des attaques meurtrières et les forces de sécurité usent de tous les moyens pour faire la répression. Dans l’Ouest du pays, c’est déjà plus 3500 morts à cause de ces violences pour plus de 700 000 déplacés, selon des organisations de l’ONU.
Des menaces à certaines équipes
En effet, certains groupes armés ont fait la promesse de perturber le bon déroulement de la CAN et ont d’ailleurs envoyé des lettres de menace aux équipes du groupe F (Tunisie, Mali, Mauritanie et Gambie). Ces équipes joueront à Limbé et s’entraîneront à Buea, respectivement station balnéaire et chef-lieu de la région du Sud-Ouest.
Pour Blaise Chamango, responsable de l’ONG Human Is right, établie à Buea, “les menaces sont très sérieuses”. “Mercredi, il y a eu une explosion à Limbé dans une vente à emporter, c’est un message fort”, assure-t-il au téléphone à l’AFP.
“Le gouvernement a déployé les soldats lourdement armés sur presque tous les carrefours de Buea et Limbé notamment. Les forces de défense et de sécurité opèrent des arrestations et des fouilles systématiques dans plusieurs quartiers”, poursuit-il dans son explication.
À Yaoundé ou encore à Douala, rien ne prouve pour le moment que ce sera une bonne ambiance. Par le passé, les séparatistes ont eu à perpétrer de petits attentats par endroit dans ces milieux. Lors de la présentation de vœux à la télévision vendredi, Paul Biya, président du Cameroun depuis 39 ans, a évoqué “plusieurs cas de reddition” dans les groupes armés.
Cependant, ils “continuent de se livrer à des activités criminelles, en multipliant les attaques aux engins explosifs improvisés et les meurtres de civils désarmés”, a prévenu le chef de l’État qui subit une forte pression des ONG. Face aux craintes de tout un chacun, le gouvernement a fait comprendre que “la sécurité sera assurée”.
Mais contactés par l’AFP, ni le pouvoir ni la Confédération africaine de football (CAF) n’ont voulu en dire plus sur le dispositif sécuritaire prévu. À Yaoundé ce lundi, à quelque 250 kilomètres à l’est de la frontière des zones anglophones, il faut noter que l’ambiance était un peu relaxe. On remarque uniquement quelques agents de sécurité qui, d’un œil plutôt distrait, surveillent tout de même les derniers préparatifs autour du stade neuf d’Olembé. Rappelons que ce stade a été construit pour la CAN.
“La situation sécuritaire ne cause de soucis véritablement que dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, mais je pense que nos forces de défense ont suffisamment d’expérience pour y répondre”, veut rassurer James Mouangue Kobila, président de la Commission des droits de l’Homme et professeur de droit public.
“Le dispositif de sécurité est exceptionnel au regard des enjeux et nous avons eu le Championnat d’Afrique des nations (CHAN), en janvier 2021, sans incident”, argumente-t-il. À souligner que le Cameroun faisait face aussi à une autre forte menace qui concerne les attaques jihadistes dans l’extrême-nord, mais depuis la mort d’Abubakar Shekau, chef de Boko Haram en mai 2021, les attaques ont un peu baissé.
“Je ne pense pas que les jihadistes puissent perturber la CAN, à moins de vouloir frapper un grand coup, ce qui est toujours possible”, estime ainsi Guibaï Gatama, directeur de publication de L’Œil du Sahel, le journal bi-hebdomadaire de référence sur le nord du Cameroun.
“Le stade de la région Nord qui accueillera le groupe D (Égypte, Nigeria, Soudan, Guinée Bissau) à Garoua, se trouve très loin de leur périmètre d’activités”, à plus de 300 kilomètres, tempère-t-il.